UN MAL POUR UN BIEN

Par Kand Owalski

La déclaration d'incompétence du Conseil constitutionnel est une preuve indirecte qu'il possède en réalité le pouvoir qu'il avait nié en 2018, à savoir, celui de statuer sur sa propre compétence. En affirmant aujourd'hui qu'il est incompétent pour arbitrer un contentieux entre le MRC et ELECAM, le Conseil a exercé précisément ce pouvoir: il a évalué la nature de l'affaire et pris une décision sur son propre rôle. Cette contradiction révèle donc que Clément Atangana et le Conseil avaient, dès 2018, la capacité d'examiner les requêtes liées à leur impartialité, mais ont sciemment choisi de se dérober.

Une telle évolution 7 ans plus tard est un mal pour un bien, en ce qu'elle expose une faille structurelle qui sera utilisée à l'avenir. En se refusant d'arbitrer le litige qui oppose le MRC à ELECAM, la Cour a précisément légitimé le pouvoir qu'il avait rejeté en 2018 : celui d'être l'arbitre de ses propres compétences. Clément Atangana et ses amis viennent de démontrer et de reconnaître qu'ils ont le pouvoir d'évaluer leur propre champ d'intervention. On sait donc que le conseil peut choisir de s'auto-exclure d'un processus en invoquant une analyse de sa mission. Car, en effet, si le Conseil peut aujourd'hui juger qu'il est incompétent pour arbitrer une affaire entre deux parties, pourquoi ne pourrait-il pas examiner la légitimité ou l'impartialité de ses propres membres ?

Clément Atangana vient de créer un précédent qu'aucun analyste sérieux ne saurait ignorer, ouvrant la voie à une contestation plus que jamais légitime, légale et profonde du rôle du Conseil et de son fonctionnement.

Nous devons tirer un coup de chapeau aux avocats du collectif Sylvain Souop, à Maurice Kamto et au MRC qui viennent de pousser le Conseil constitutionnel dans une position inconfortable, laquelle va davantage fragiliser le socles d'arguments fallacieux qui ont justifié son immobilisme en 2018. Lors des crises à venir, qu'il est en train de faire germer aujourd'hui, il sera beaucoup plus difficile pour ses membres de se retrancher derrière des excuses bidons aux apparences techniques ou procédurales. Il suffira d'exploiter cette contradiction pour lui demander des comptes sur les questions de transparence et d'impartialité. Ce mal apparent est donc, paradoxalement, un bien déguisé.

Kand Owalski